État et droit de nécessité

Article du « Courrier de Rome » N° 285 - Septembre 1988

L'état de nécessité et le droit consécutif de nécessité est un des arguments avancés par Notre Seigneur Jésus-Christ quand il veut démontrer l'innocence de ses disciples accusés par les Pharisiens d'avoir violé la loi du repos sabbatique en cueillant des épis pour calmer leur faim : Jésus évoque l'épisode de David qui, poussé par la nécessité de la faim « entra dans la Maison de Dieu, et mangea les pains de proposition, dont il n'était permis de manger ni à lui, ni à ceux qui étaient avec lui, mais aux prêtres seuls » (85).

L'état de nécessité est considéré par le Droit canonique comme l'une des causes qui, aux conditions fixées, suppriment l'imputabilité (86) du « délit », lequel se trouve alors réduit à une violation purement matérielle de la loi (87). Le communiqué du 30 juin 1988 de la Salle de Presse du Vatican faisait d'ailleurs référence dans le cas de Mgr Lefebvre, à ce droit de nécessité, même si c'était pour le nier.

L'état de nécessité, ainsi que l'expliquant les juristes, est un état dans lequel des biens nécessaires à la vie naturelle ou surnaturelles se trouvent menacés, de telle sorte que l'on se trouve normalement contraint, pour les sauvegarder, d'enfeindree la loi (88).

Pour être amis à invoquer l'état de nécessité et se trouver au bénéfice du droit correspondant, il faut :

  1. qu'existe vraiment un état de nécessité ;
  2. qu'on ait tenté d'y remédier en recourant aux moyens ordinaires ;
  3. que l'acte « extraordinaire » accompli ne soit pas intrinsèquement mauvais et qu'il n'en résulte pas un dommage pour le prochain ;
  4. que, dans la violation de la loi, on se tienne dans les limites des exigences réellement imposées par l'état de nécessité ;
  5. que l'on ne remette d'aucune façon en question le pouvoir de l'autorité compétente et que l'on puisse, au contraire, présumer raisonnablement que, dans des circonstances normales, elle eût donné son assentiment.

Ces cinq conditions se trouvent toutes réunies dans le cas des consécrations épiscopales effectuées par Mgr Lefebvre.

Suite de l'étude


(85)     Matth. 12, 3-4.

(86)     Pour qu'une personne soit punissable, il faut : a) une violation de la loi ; b) que cette violation lui soit « imputable » c-à-d qu'on soit fondé à la lui reprocher ; c'est là qu'intervient l'état de nécessité ; c) que cette personne soit responsable. Si elle est irresponsable, elle ne peut être punie, bien que le délit lui soit imputable.

(87)     Cf. can. 2205 § 2 ancien Code de Droit canonique et can. 1323 N° 4 du nouveau Code qui dit : « N'est punissable d'aucune peine la personne qui, lorsqu'elle a violé la loi ou un précepte :... ele a agi forcée par une crainte grave, même si elle ne l'était que relativement, ou bien poussée par la nécessité ou pour éviter un grave inconvénient, à moins cependant que l'acte ne soit intrinsèquement mauvais ou qu'il ne porte préjudice aux âmes... »


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